Instantané 1. La psychiatrie c’est où ?
A Maputo, la psychiatrie c’est à Infulene. C’est ce que j’entends de tous ceux à qui je pose la question. Avec l’hôpital psychiatrique de Nampula, au nord du pays, voilà l’offre de soin spécialisée en psychiatrie au Mozambique.
En fait il y a un peu plus que cela. En lisant un article publié tout récemment dans une revue américaine et cosigné par une psychologue mozambicaine et des psychiatres américains de la faculté de Médecine de Columbia University[1], j’ai compris qu’il y avait aussi un service de psychiatrie à l’hôpital central de Maputo, une grande enclave située au milieu de la ville.
Deux services dans la capitale c’est peu, mais cela permet déjà de créer un filtre de répartition des patients. D’après le Dr. Pastor, un psychiatre qui travaille à Infulene depuis un an, ici ce sont les psychotiques, tandis que sa femme s’occupe des névrotiques à l’hôpital central où elle est psychiatre de l’unité. Quand il détaille le contenu de ces catégories empruntées à la nosographie psychodynamique, le Dr Pastor fait jouer la distinction selon la gravité de la pathologie mais il sépare aussi ceux qui demandent à être hospitalisés parce qu’ils sont conscients d’être malades et les autres. Difficile de savoir dans quelle mesure il décrit une réalité observée. Dans mon expérience, il est assez fréquent que des personnes ayant des troubles graves demandent à venir à l’hôpital quand ils se sentent trop mal dehors. Surtout, je suis frappée de retrouver cette vieille distinction, que les standards internationaux et la référence englobante aux « troubles psychiques » ou « de santé mentale » tendent à estomper. Elle oppose les cas lourds, les fous, les « cas psychiatriques », aux troubles dits légers, les « cas psychologiques », les « petits mentaux » du 19ème, dont la capacité à décider ou à agir de façon rationnelle n’est pas mise en question.
[1] Santos PF, Wainberg ML, Caldas-de-Almeida JM, Saraceno B, et al. Overview of the mental health system in Mozambique: addressing the treatment gap with a task-shifting strategy in primary care. Int J Ment Health Syst. 2016;10(1):1